mardi 19 décembre 2017

Retrouver le goût perdu de Noël

Il a existé en moi, un jour. Mais il est parti. Ou alors il s'est caché. Cerné par les images criardes de pères-noëls clonés, de neige artificielle et de lutins idiots. Etouffé par les chansons qui passent ad nauseam dans tous les endroits publics. Rongé par la lèpre du marketing. J'ai beau fuir dès la fin novembre les centres commerciaux et la télé aux heures de grande écoute, l'injonction est partout, aussi tyrannique que dégoulinante de mièvrerie : il FAUT céder à la "magie de Noël". Injonction impossible, puisque cette magie réside dans ce qu'on ne voit pas et qu'on imagine, dans ce qu'on attend et ce qu'on espère. Or, je n'ai malheureusement plus sous la main des enfants en âge de me rebrancher en direct avec cette magie-là, la vraie. 
Et puis je suis tombée sur cette photo, et en moi, quelque chose a tressailli. Pas de la nostalgie (même si la cagoule de l'enfant de droite me rappelle furieusement celle que je portais au même âge). Mais une émotion pure, surgie de très loin. Ce doigt posé sur le verre épais de la vitrine, ce sérieux imperturbable...  Parce que oui, le désir, c'est du sérieux. Tout comme le mystère. 
Cette émotion-là, c'est celle de mon enfance. Je ne l'ai pas perdu, le goût de Noël. Je l'ai juste enfoui très profondément, bien à l'abri. Je suis bien contente que les marchands n'aient pas réussi à me le voler. 

samedi 9 décembre 2017

Le pyjama d'Adrienne

 "Rencontrer le président du Chili en combinaison d'aviateur ? Vous n'y pensez pas ! En pyjama de soie ? Vous plaisantez ! " Adrienne Bolland vient de traverser les Andes dans son petit avion. Et la communauté française du Chili est atterrée : l'héroïne du jour n'a rien à se mettre pour les cérémonies organisées en son honneur. "L'essentiel, n'est-ce pas, était qu'une femme qui vient de traverser les Andes en avion ne ressemble pas trop, tout de même, à une aviatrice", raconte-t-elle plus tard avec ironie. La suite est savoureuse : juste avant la réception, on lui fabrique à la hâte une tenue "convenable". Résultat : "Nous avions quatre bonnes heures de retard, la robe, le chapeau et moi." Adrienne s'en excuse auprès du président, en expliquant le problème. "Il éclata de rire, avec une décontraction qui eût fait honneur à la délégation française de Santiago". Convenant avec elle qu'elle est beaucoup plus élégante en pyjama de soie, il lui proposa de passer les troupes en revue ainsi vêtue. "Lorsque les Français me virent apparaître, je crus qu'on allait compter plusieurs crises cardiaques." 
C'est pour des anecdotes de ce genre que j'aime Adrienne : elle adore déranger l'ordre établi. Non par caprice. Plutôt par un goût immodéré de la liberté.  Et aussi une propension à s'amuser pour oublier que la vie peut être tragique...

Les déceptions de Fanny

Elle s'appelait Fanny Flis, née Tesler. C'était une femme belle, blonde et élégante. qui faisait de la discrétion la première de tou...