lundi 23 octobre 2017

L'intrépide et la libellule


Jour après jour, j'apprends à connaître Adrienne Bolland.
Intrépide, gouailleuse, insolente, elle a vécu 80 ans sans qu'aujourd'hui, à part dans le petit milieu de l'aviation, on se souvienne de son nom. Avoir la possibilité de la faire un peu sortir de l'ombre en écrivant un livre sur elle me met en joie.

La semaine dernière, les photos en noir et blanc ont pris des couleurs : j'ai vu voler son avion dans le ciel de la Ferté-Alais. Ce passage au technicolor a effacé pour un temps les années  qui  nous séparent. Il m'a surtout fait mesurer le culot insensé qu'il fallait
pour traverser les Andes sur un pareil rafiot.
Le Caudron G3 fait un bruit de pétrolette et il ressemble à une libellule. Une fois installé dans son siège, le pilote a tout le haut du corps exposé au vent. Et il ne dispose d'aucun instrument de navigation. De son exploit, pourtant, Adrienne  ne se gargarisait pas. Elle disait simplement : "L'aviation m'a fait découvrir mon royaume intérieur. C'est une chose que personne ne peut vous prendre." Ce royaume, je suis en train de l'explorer. Et c'est un sacré voyage...

mardi 17 octobre 2017

Un grain d'années folles

Un des plaisirs du roman, c'est de plonger dans des lieux et des époques qui ne sont pas les nôtres. Me voilà depuis quelques jours passagère en transit dans les années 20. Malgré le cheveu court alors de rigueur chez les garçonnes, ça décoiffe sévère ! Dans ces années d'après-guerre, tout va vite, tant il faut rattraper le temps perdu dans la boucherie qui vient de s'achever. Et les femmes (du moins, certaines d'entre elles) sont les premières à se jeter à corps perdu au coeur du tourbillon. Elles fument en public, elles apprennent à conduire, elles ont des amants... Adrienne Bolland pourrait être ce "mauvais sujet" qui fait la couverture de la Vie parisienne en septembre 1919. A cette date, elle s'apprête à prendre ses premières leçons de pilotage pour devenir aviatrice. En attendant, elle s'étourdit de bulles et de musique dans les dancings de Montparnasse. Cette liberté revendiquée il y a près de cent ans donne à réfléchir sur le long chemin de l'émancipation féminine, qui d'avancées exaltantes en déprimantes reculades, n'est toujours pas arrivée à destination...

mardi 10 octobre 2017

Elle, Adrienne...


C'est ma prochaine coloc'. Celle avec laquelle je vais vivre pendant quelques semaines. Et je suis drôlement contente qu'on se soit choisies. A son regard qui frise,  à son sourire narquois, je sais déjà qu'on va bien se marrer. 

Bon, ça n'a pas l'air d'être toujours quelqu'un de facile. Elle m'a prévenue : "j'ai un caractère de cochon". 

Son truc, c'est qu'elle ne voit pas pourquoi on l'empêcherait de faire ce qu'elle a envie. Forcément, ça ne plait pas à tout le monde. Mais quand elle plane, là-haut, personne ne peut rien lui dire. Elle est libre. 

Oui, je ne vous ai pas dit. Ma coloc' est aviatrice. Elle pilote comme personne des petits coucous qui bourdonnent comme des libellules. Elle a même traversé les Andes avec. 

Quand je la connaîtrai un peu mieux, je vous raconterai son histoire. Vous verrez, c'est un sacré personnage.

mercredi 4 octobre 2017

C'est joli, c'est intéressant, mais...

Photo : Richard Avedon


...Pourquoi la mode ? 



Cette question, je l'entends parfois quand je présente notre collection des Petites histoires de la mode. Je réponds qu'avec Sophie Gallo-Selva, l'éditrice, nous cherchons à communiquer aux plus jeunes notre goût commun pour les histoires et les vêtements qui font rêver. 

"Oui, d'accord, m'objecte-t-on, mais pourquoi ne pas plutôt choisir de faire la même chose avec des peintres, des écrivains ou des figures historiques ? " Derrière cela, il faut bien sûr entendre : "pourquoi accorder tant de place à quelque chose d'aussi futile ?" La critique peut même aller plus loin : en parlant de mode aux enfants, est-ce que nous ne les incitons pas à devenir esclaves des tendances, des apparences et des marques de luxe ? 

Je ne crois pas. Les histoires que je raconte sont souvent au contraire des récits d'émancipation : émancipation de femmes qui s'échappent de la condition où on les assigne, émancipation de créateurs qui font exploser les codes et les carcans... L'émerveillement face à la beauté n'empêche pas le recul, l'ironie, voire la critique du monde qui la produit. 

Et puis j'ai découvert autre chose : les petites histoires de la mode se partagent très volontiers. Quand je les dédicace, c'est de la part d'un grand-père pour sa petite fille, d'une quinquagénaire pour sa vieille maman, d'une jeune femme pour sa fille ("Mettez nos deux noms, on le lira ensemble"), d'une ado à sa meilleure copine, d'un mari à sa femme. C'est comme une passerelle entre gens qui s'aiment. Cette raison d'être de la collection, nous ne l'avions pas prévue. Mais c'est sûrement la plus belle. 

lundi 2 octobre 2017

Adios, Cristobal !

Dernier échange de corrections avant le "Bon à tirer" final, sur notre Cristobal Balenciaga, quatrième opus des Petites histoires de la mode
Finir un livre, c'est toujours un curieux mélange : d'un côté, le soulagement de se dire : "Basta !" On arrête là le cycle infernal des relectures, des pinaillages et des doutes. des corrections et des corrections de corrections. 
Mais de l'autre, il y a la nostalgie de ce qu'on va perdre. Je viens de passer plusieurs semaines avec Cristobal. J'ai essayé de me mettre dans sa tête, j'ai visité son village sur la côte basque, j'ai vu sa maison, j'ai lu plein de livres sur lui, j'ai rêvé sur ses robes... Et j'ai l'impression que je l'abandonne sur le bord de la route. 
Désormais, il va "vivre" sans moi, dans le regard de ceux qui découvriront son histoire. Alors, si vous le rencontrez, prenez bien soin de lui. C'est un garçon fragile...

Les déceptions de Fanny

Elle s'appelait Fanny Flis, née Tesler. C'était une femme belle, blonde et élégante. qui faisait de la discrétion la première de tou...